ALTERSEXUALITÉ & ORTHOSEXIE

VIENT DE PARAÎTRE :



Le contrat universel : au-delà du « mariage gay », de Lionel Labosse

ISBN : 978-2-9536297-1-2

4e de couverture
L’adoption prochaine du « mariage gay » semble inéluctable. La gauche y est favorable, la droite rumine ses réticences. Mais a-t-on réellement évalué la question, a-t-on pris la mesure des problèmes sociaux que recèle la réforme des unions entre les êtres ? À une époque où le pacs a dépassé le mariage en nombre de contrats signés par an, où il y a un divorce pour deux mariages, et où le nombre d’enfants nés hors mariage a passé la barre des 50 % ?
Au lieu de nous enfermer dans le piège d’un mariage dont les hétéros mêmes ne veulent plus, pourquoi ne pas opter pour un Contrat universel ? Un tel contrat profiterait à tous ceux, hétéros ou homos, immigrés ou nationaux, jeunes ou vieux, mono ou bisexuels, qui se sentent à l’étroit dans le couple.
Ainsi, au-delà du « mariage gay », le Contrat universel propose un nouveau type d’union englobant le couple, le trouple, ou plus si affinités. De plus, il réaffirme les principes de Liberté, d’Égalité et de Fraternité.


L’auteur
Né en 1966, Lionel Labosse enseigne le français. Il s’exprime sur son site altersexualite.com et dans ses précédents ouvrages, fiction ou essai. Il a introduit en France  le terme et la notion d’« altersexualité », qui unit en un seul mot la diversité sexuelle habituellement représentée dans l’acronyme « LGBT ». L’altersexualité

Pour plus d’informations
https://www.altersexualite.com/spip.php?article702



Introduction à Altersexualité, éducation & censure,un essai paru chez Publibook

par Lionel LABOSSE


La valeur d’une chose réside parfois non dans ce qu’on gagne en l’obtenant,
mais dans ce qu’on paye pour l’acquérir,- dans ce qu’elle nous coûte. […] Les institutions libérales cessent d’être libérales aussitôt qu’elles sont acquises […] Les mêmes institutions,
tant qu’il faut combattre pour elles, ont de tout autres conséquences ;
elles favorisent alors, d’une façon puissante, le développement de la liberté.

Friedrich Nietzsche,

Le crépuscule des idoles ou Comment on philosophe au marteau.
Flâneries d’un inactuel, 38. Bouquins, p. 1012

Que l’auteur se présente ! Mon premier livre publié s’intitule L’année de l’orientation (Publibook, 2003). Ce roman épistolaire réunit deux adolescents confrontés à des titres divers, à l’homosexualité. Je l’ai écrit surtout à destination des adolescents d’aujourd’hui, mais aussi pour régler son compte à celui que j’ai été. Dans le civil, j’enseigne le français dans un collège d’Île-de-France ; mais le prof en moi n’aura dans ce livre qu’un rôle de personnage de pamphlet. Ce prof intervient parfois devant des classes pour présenter son livre, et au-delà, contribuer à combattre préjugés et discriminations sur un sujet encore tabou. Cela fait de lui un des « experts » en ce domaine. C’est à ce titre qu’il a été invité à participer à une rencontre-débat organisée par La Maison des Enseignants le 23 juin 2004 au Lycée Saint-Louis à Paris sur le thème « L’école et la prévention des discriminations liées à l’orientation sexuelle et à l’identité de genre. »

(…) J’ai entamé un deuxième texte, prenant pour sujet la censure moins orthosexiste qu’économique subie par L’année de l’orientation, harangue que j’envisageais de prononcer devant cet aréopage ; mais comment réprimer la nature tumultueuse des torrents à la débâcle ? Ce deuxième discours, tel un brin de muguet qu’on cueillerait dans la ferveur printanière et qui entraînerait toute la terre humide avec ses racines et la forêt entière, je n’ai pas pu le terminer que cette endoscopie des entrailles de la censure n’ait été menée à son terme, et ne soit remontée dans le cœur du monstre, c’est-à-dire la Pieuvre de l’édition, dont la tête unique a sa caverne dans le rocher de l’État, et dont les huit bras broient le cadavre de toute pensée libre qui passerait à sa portée ! C’était à nouveau trop long !

J’ai remisé mes blablas dans ma poche, et différé la profération de mes prophéties. J’ai relu et complété le tout, et j’ai achevé de vider mon sac, jusqu’au fond du fond. Une troisième philippique beaucoup plus laconique complète l’ouvrage, adressée à un ministre éphémère, et refusée à l’époque par tous les organes de presse à qui elle avait été proposée. Un dernier libelle au vitriol démonte pièce par pièce, sur un cas d’espèce, le mécanisme de l’instrumentalisation d’un fait divers par la Pieuvre. Ces quatre textes mousquetaires ferraillent à qui mieux mieux contre cagots, ragots, fagots et cabots.

En partant d’une indignation de spectateur devant le travestissement révisionniste de la culture antique constaté dans un péplum récent, je vous propose une réflexion sur la censure orthosexiste. J’y développe le concept d’altersexophobie active et passive. Avec une virulence qui réjouira aussi bien l’intégriste de l’anticléricalisme que le catholique sincère, je m’attaque au Vatican, qui ne cesse de jeter de nouveaux fagots pour entretenir les bûchers où l’on brûle les hérétiques. Enfin, ne reculant devant aucun sacrifice, je demande l’inscription de l’altersexophobie sur la liste des maladies mentales de l’O.M.S. Ne croyez pas que je rigole !

Je nous engage ensuite, humbles lecteurs, à nous réveiller de la léthargie où nous plongent les faux débats agités par la classe politico-médiatique. Ce ne sont pas de nouvelles lois de plus en plus restrictives de censure d’opinions personnelles qui sauveront les libertés fondamentales en France et en Europe, c’est la révolte des citoyens devant la gangrène qui putréfie jour après jour la presse et l’édition, donc toute la liberté d’expression, et l’engloutit dans le ventre de l’industrie, notamment l’industrie des armes.

La démocratie est en danger, alors cessons, citoyens, gais ou non, de foncer tête baissée dans les chiffons rouges ou roses ou dans les foulards noirs qu’on nous agite sous le nez ; relevons le mufle, et regardons le matador dans les yeux ! Ne nous rendons pas complices de ce qui nous opprime. Les pages que je consacrerai à l’islam et aux cultures immigrées ne sont pas des digressions. Elles développent une conviction selon laquelle la réflexion sur l’oppression ne peut pas s’enfermer dans un type de discrimination, sauf à devenir elle-même discriminante. C’est en lisant Voltaire, Fanon, Mandela, Gandhi, Césaire, et bien d’autres, que ma réflexion sur l’altersexophobie s’est construite.

Enfin, et c’est le constat le plus douloureux, que les gais prennent garde à ne pas se laisser instrumentaliser par les médias, par la classe politique, par le mercantilisme, et, pire, par les inévitables arrivistes, qui jouent des poignets, pour se hisser, en se servant du mouvement altersexuel comme marchepied, sur l’estrade du pouvoir médiatico-politique. (« Jaloux ! » me dit l’ami Robert, « tu t’y verrais bien à leur place sur l’estrade, avoue ! ») Ne nous laissons pas endormir par les bonbons acidulés qu’on nous jette dans la bouche. Nous ne voulions pas être des phoques ; ne soyons pas des otaries !

Plus j’avançais dans la rédaction de ces diatribes, plus je replongeais dans mon adolescence, et plus j’y puisais à la source de la verve que m’a infusée Léo Ferré. Eh oui ! l’idole de mes quinze ans n’était pas une potiche de télé-réalité. Chaque mot qui me vient est pétri de son âme. Tes « graines d’ananar », Léo, je les jette, épines ou pétales, de roses roses ou noires, sur les cercueils des tyrans ou dans les yeux des adolescents. Pardon pour ce lyrisme post-pubère, ô mes lecteurs, c’est ce que j’ai de plus gai. Si j’ai recouru sans frein à ce style cinglant, c’est parce que je ne supporte plus les discours cauteleux, les précautions hypocrites où nous accule la crainte de nous faire des ennemis. Si nous redevenions des gentilshommes, qui n’acceptent de se battre -- peu importe le prétexte -- qu’à condition que l’attaque soit franche, et que l’escrime ait du style ? Les personnes citées et visées dans ces lignes ne sont pas les personnes réelles, mais leur reflet social. Les membres de ma famille qu’il m’arrive d’évoquer sont des leurres. Ceci n’est pas une autobiographie. Ne vous plaignez pas de l’attaque, ô innocentes victimes, mais réjouissez-vous d’être promues à la qualité enviable de personnages de pamphlet ! Si le soufflet vous chauffe la joue, pamphlettez-moi en retour. Du moins si je m’attaque à vous, c’est que je vous en estime dignes, et non tels ces monstrueux moutons dont l’esprit critique à son plus haut point d’ébullition, ne condescend qu’à s’insurger contre la capacité des exaltés que nous sommes à nous indigner pour ce qu’ils appellent rien, et que nous appelons la vie.

Dans cet ouvrage, par le mot « altersexuel », alternant avec « gai », je désignerai l’ensemble des « personnes dont la sexualité est autre qu’exclusivement hétérosexuelle », comme il sera expliqué. Les néologismes « altersexualité » et « altersexophobie » économiseront de longues périphrases. La nuance sera à peu près la même que celle qu’établissait dans les années 60 l’association Arcadie entre « homophile » et « homosexuel », ou celle qu’on pourrait rétablir entre « pédophile » et « pédosexuel » si l’on se souciait de propriété langagière pour ces êtres que la morale commune à tout humain vraiment humain ne peut que reléguer dans l’enfer de la vilenie. L’altersexualité est aussi bien une autre façon d’envisager la sexualité, qu’une sexualité résolument respectueuse d’autrui. Pour faire pendant, j’utiliserai le concept d’orthosexualité, décliné en orthosexie, orthosexuel, orthosexisme, orthosexocrateet orthosexocratie, dont les nuances apparaîtront en contexte sans qu’il soit besoin de téléprompteur ou d’obscurs éclaircissements.

Le lecteur subtil aura compris à quoi fait allusion cette substitution de vocable. De même qu’il était important de passer de l’anti à l’altermondialisation, créer nos propres mots nous sortira de l’aliénation lexicographique. Il importe également de rappeler à une certaine bourgeoisie qui a tôt fait d’annexer le gai bobo et le notable gai, qu’il existe un dernier carré d’irréductibles altersexuels, qui ne rêvent pas que de mariage en gants blancs où l’hypocrisie enfile une bague de jais au doigt de l’infidélité. À l’époque où certains prétendus « gais » aspirent à l’orthosexie du mariage, et s’apprêtent à regarder de haut travestis, bisexuels et autres inclassables céliplusbasquetaires, la frontière qui séparait naguère les « hétérosexuels » et les « homosexuels » est devenue obsolète.

Il y aura désormais une « orthosexie » résiduelle, de plus en plus minoritaire, triste dans l’âme, et une « altersexualité » foisonnante et irrémédiablement gaie. L’orthosexuel n’existe qu’en pack de deux -- ou par pack de douze pour les partouzes entre gens bons -- on ne peut pas l’inviter à dîner sans sa moitié ; l’orthosexuel adôoore, dans les toilettes carrelées et javellisées de la conscience, tirer vingt centimètres de pédé propre et sexe, pour s’en laver les mains. Quand il est responsable des piscines de Paris, l’orthosexuel fait afficher ce genre d’avertissement : « IL EST INTERDIT DE SE DOUCHER NU, LA PISCINE EST UN LIEU PUBLIC. » Il n’a jamais entendu un étranger se gausser de cette manie franchouillarde de se doucher habillé, qui nous vaut la réputation d’être un des peuples les plus sales du monde. Sur les plages, l’orthosexuel existe en version « textile » aussi bien qu’en naturiste, mais dans les deux cas, il déteste que les buissons s’agitent sur son passage. Il n’a pas purgé sa conscience des sanies de la faute en matière de sexualité : qu’il soit coincé ou provocateur, pour l’un comme pour l’autre, la sexualité n’est pas un don, mais un devoir ; tout comme le bouffeur de curé prouve par son obsession qu’il n’en a pas fini avec Dieu. Laissons donc entre leurs griffes la mue désormais morte de l’ « homosexualité », et enfuyons-nous sous cette nouvelle peau dans l’utopie de l’altermonde. Qui vient avec moi ?


(Extrait)


10 juillet 2004, © Lionel LABOSSE

pour en savoir plus sur Lionel Labosse :

mailto :

Lionel Labosse - www.altersexualite.com


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